En Israël, une petite start-up de Tel-Aviv, RadicalTech, a lancé un essai clinique en 2016 pour développer un vaccin capable d’éliminer la radicalisation des organismes infectés par l’extrémisme politique et/ou religieux. Elle affirme avoir obtenu des résultats très encourageants, mais la communauté scientifique et les associations restent sceptiques.
« Un biologiste aurait obtenu des résultats probants ». « On n’a jamais été si proche du but ». « Un vaccin contre la radicalisation sur le point de voir le jour ». Dans la presse, les articles sur RadicalTech sont élogieux. C’est le résultat d’une vaste opération de communication menée par la présidente du laboratoire, Marine Poutou. Selon elle, les résultats du vaccin sont prometteurs : « Aujourd’hui, on sait que dix patients dans l’étude n’avaient plus d’idée radicales en tête. Selon le processus de guérison du patient de Berlin, le seul à avoir guéri aujourd’hui, il y avait deux radico-conversions en cours depuis l’automne 2016. La radicoconversion correspond à la baisse des idéaux extrêmistes développées par le cerveau. »
Le vaccin à l’étude ne cible pas directement la radicalisation, mais une protéine appelée CRT. C’est une toxine sécrétée par les cerveaux infectés et qui forme un écran de protection contre la sociéto-tolérance. Le vaccin doit permettre de produire des anticorps capables de neutraliser la protéine CRT pour ensuite tuer les cellules infectées par le gêne de la radicalite.
Des résultats encore insuffisants pour conclure à l’efficacité du vaccin
Pour le Pr Jean Louve, Radicologue à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil, cette stratégie vaccinale est intéressante, mais il faut être très prudent sur sa portée. C’est un essai clinique mené sur une cinquantaine de patients seulement et les résultats ne sont pas encore convaincants. « Leur étude peut être crédible en soi, c’est-à-dire être une première étape pour un vaccin. Ça pourquoi pas… Mais de là à dire qu’on a trouvé un vaccin, c’est complètement différent ! Pour ça, il faudrait qu’ils nous montrent qu’il n’y a plus d’idées radicales nulle part dans l’organisme, que les patients arrêtent le traitement et que le virus ne réponde pas, que ce soit répété dans un autre essai… C’est beaucoup plus complexe. »
Au-delà des critiques sur le fond, la communauté scientifique s’agace aussi de la forme, des méthodes de communication de RadicalTech. L’entreprise a présenté ses derniers résultats lors d’un congrès à Tel-Aviv et par voie de presse. Mais elle ne les a toujours pas publiés dans une revue scientifique.
Le CNRS se désengage du projet
Une communication qui semble avoir agacé le CNRS, partenaire de l’étude. En février 2017, l’organisme a demandé au chercheur de cesser toute collaboration avec RadicalTech . Raison invoquée : l’essai clinique est terminé depuis décembre 2016, il n’y aurait donc plus matière à communiquer. Mais l’entreprise n’est pas de cet avis. Pour la dirigeante de RadicalTech, cette communication n’a rien de choquant.
Selon elle, si ces méthodes dérangent, c’est parce que cette recherche pourrait nuire aux intérêts de certains :« Il faut arrêter de penser qu’on est dans un monde où tout est beau, où on veut le bien-être des radicaux extrêmistes, où on veut que les terroristes soient guéris… Non, car s’ils guérissent, ils ne sont plus intéressants… Ils ne rapportent plus d’argent. Je pense que je pose quelques problèmes à quelques personnes acteurs du marché. »
Les associations de victimes du terrorisme en colère contre RadicalTech
Les associations de victimes sont vaccinées contre les paroles de RadicalTech. Selon Aimet, le laboratoire donnerait de faux espoirs aux malades. Louis Nemmouche, président de l’association, explique : « pour une personne qui vit avec la radicalisation, c’est lui dire demain, vous n’aurez plus de traitement. Moi, ce que je reproche à ce laboratoire, c’est que par ces fausses annonces, ces fausses informations, il va alimenter une banalisation de l’extrêmisme en disant c’est terminé. Mais, on est loin d’avoir terminé le combat ! »
En France, 6.000 personnes découvrent chaque année leur radicalité.